Grand-messe du théâtre en France, le festival d’Avignon réunit tous les étés l’avant-garde de la création théâtrale et scénique contemporaine internationale. En cette 67ème édition, la scène africaine y est particulèrement mise à l’honneur. Revue d’effectif de la création contemporaine africaine présente cette année dans la Cité des Papes.
Le reflet d’un garçon se découpe en ombre chinoise dans l’eau dorée d’une rue insalubre. La paume de sa main flotte dans l’air, dans une immortelle et gracieuse recherche d’équilibre. Surplombant la boue de sa morne silhouette, un lampadaire courbe l’échine, impuissant, désolé. Premier choc esthétique de cette édition du festival d’Avignon, cette photographie du congolais Kiripi Katembo, qui en constitue l’affiche officielle, illustre la place centrale qui est donnée cette année à la création africaine.
Car, et ce pour la première fois de l’histoire du festival, un artiste africain – Dieudonné Niangouna auteur, comédien et metteur en scène congolais (Brazzaville) – est invité comme artiste associé. Connu pour son « théâtre de l’urgence », pêle-mêle poétique marqué par l’histoire de la colonisation et les conflits internes, et remarquable d’innovation linguistique – il convoque aussi bien le français que des langues traditionnelles –, celui dont c’est la troisième participation au festival a eu la délicate mission de prendre part et d’encadrer la réflexion, la préparation et l’organisation de cette 67ème édition.
C’est donc sans surprise qu’on le retrouve, outre Shéda, son spectacle onirique centré sur « un flot d’images et de mots » et présenté dans la Carrière de Boulbon, à partager l’affiche avec plusieurs grands noms du théâtre, qu’ils soient africains (comme son compatriote DeLaVallet Bidiefono) ou qu’ils évoquent l’Afrique (Jean-Paul Delore et son spectacle Sans Doute, Stanislas Nordey dans Croisements, partage). D’autres grands représentants de la création contemporaine seront également présents, à commencer par Faustin Linyekula. Le chorégraphe, originaire de Kisangani (République démocratique du Congo) où il entreprend désormais des projets de développement à travers l’art, reviendra avec son spectacle Drums and Digging sur ses premières émotions chorégraphiques. Autre personnalité majeure de la danse africaine, le chorégraphe nigérian Qudus Onikeku (également à l’origine de la Nollywood Week de Paris dont nous parlions précédemment), grandement inspiré par sa culture yoruba et l’histoire du Nigéria, présentera son spectacle Qaddish convoquant l’histoire et la mémoire de son père.
Alors que le lancement de la saison sud-africaine a eu lieu il y a quasiment un mois avec Robyn Orlin au Théâtre National de Chaillot, la création contemporaine sud-africaine est de nouveau mise à l’honneur à Avignon où Brett Bailey y présentera son polémique Exhibit B – variations, à l’aide de « tableaux vivants », sur le thème des expositions coloniales – et Mamela Nyamza et Faniswa Yisa participeront au programme de création Sujet à vif.
Enfin, cette année sera indéniablement placée sous le sceau de la diversité, illustrée par la grande variété de pays africains représentés (Congo, RDC, Afrique du Sud, Nigéria, Burkina Faso,…) mais également par la multiplicité des arts représentés – danse, théâtre, cinéma, photo (notons la présentation du travail de Kiripi Katembo, mais également du burkinabé Nyaba Ouedraogo et du canadien Philippe Ducros, connu pour son travail autour des camps de réfugiés africains) et la présence de nombreux jeunes et prometteurs talents africains.
Le festival d’Avignon se déroulera du 5 au 26 juillet 2013.